Etre de son temps

 

 La décision de centrer ma peinture sur l'omniprésence de l'image dans le monde a pris naissance au milieu des années 80, alors que le recours à la figuration comme moyen d’expression, même non exclusif, commençait à être « mal vu ».  L'usage de la peinture elle même ne devait pas tarder à subir le même sort. Ce choix a été fait en toute conscience, car enfin, que vaut un artiste qui, aprés un siècle d’émancipation de l’art, se plie aux modes et aux injonctions des instances de son temps ? A peu près rien.

Georges Brassens était là pourtant, pour dire et chanter : 

               "Que jamais l’art abstrait, qui sévit maintenant 

                 N’enlève à vos attraits  ce volume étonnant

                 Au temps ou les faux culs sont la majorité  

                 Gloire à celui qui dit toute la vérité."

Certes il y eût de grands abstaits, il faut bien sûr entendre ces vers avec humour, mais avons nous intérêt à voir le désir disparaitre de nos vies et de notre art ?

 Petit enfant, je me souviens avoir été ébloui par la reproduction en noir et blanc, dans un dictionnaire, du tableau « Le gobelet d’argent » de Chardin. Jeune adolescent, d’avoir rêvé sur la « Diane sortant du bain » de Boucher, puis trés vite, d’être tombé simultanément sous le charme des oeuvres de Michel-Ange et de Picasso.

Ce qu’il fallait peindre, à vingt-cinq ans, dans les années quatre vingt, personne n’avait à me le dicter. C’est aux artistes eux même de décider du devenir de l’art.

Jeune homme, je me suis fait cette réflexion : si les gens vont dans les musées et aux expositions des peintres du passé, c’est que demeure vivant en nous ce qu’il y a de touchant dans ces oeuvres.

 Il ne s’agit pas, évidemment, de répéter stricto sensu dans un temps nouveau les gestes du passé (tentative vouée à l’échec), pas plus que de faire table rase du passé (entreprise tout aussi vaine).

Dali donnait d’ailleurs ce conseil « Ne t’occupe pas d’être moderne. C’est l’unique chose que malheureusement, quoi que tu fasses, tu ne pourras pas éviter d’être ».

Le XXéme siècle aura été celui du mythe des profondeurs, tristement pour la deuxiéme moitiée de celui-ci. Paul Valéry pouvait pourtant nous éclairer puisqu'il écrivait :

               "Ce qu'il y a de plus profond en l'homme, c'est la peau.."

De fait, ce qui nous apparaît est un des aspects de la réalité, égal en intensité et en profondeur à ce qui nous est caché.

Etant décidé à ne renoncer à rien, ce que je devais faire s’est imposé de soi même et pourrait se résumer dans la rencontre de quatres héritages :

                Structurer les tableaux en pensant à Mondrian.

                En faire des natures mortes en pensant à Chardin.

              Remplir les cases avec toutes les choses du monde en pensant à Dali. Mais plutôt dans le sens du "contenu latent" que du "contenu manifeste".

                Dédier certaines cases à la « figuration libre » en pensant à Picasso.

Evidemment, cette quête s'est poursuivie sur toutes ces années et se poursuit encore aujourd'hui. Il faut enfin bien préciser, comme je le dis sur la page d'accueil, que mon travail se divise en deux parties : d'une part des tableaux comme je viens de vous l'exposer, d'autre part des collages, dessins, sculptures, majoritairement du type "figuration libre", qui constituent des études pour les tableaux.

 

 Malraux a proposé que chacun se constitue son "musée imaginaire", puisque l’art du monde entier était  désormais accessible par l’image. Il est bien naturel qu’un peintre poursuive cette réflexion en peinture. L’époque n’est plus aux visions autocentrées et uniformes. A l’ère d’internet, il est important de s'ouvrir à la diversité et au plaisir de voir les choses du monde interfèrer et se magnifier mutuellement.

 Ce court texte de présentation n'a pas pour objet de tout dire de ma peinture, il me faudrait parler : du temps, du vide, du corps, des frontiéres... Ce sont des sujets essentiels dans mes tableaux, mais pour l'heure, j'espère que vous aurez plaisir à regarder ces réalisations.

 N' hésitez pas à me poser des questions.                                       Amicalement,           

                                                                

                                                                                                                                      Dominique Gosselin

 

 

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